La constitution civile du clergé


 Nous sommes à Paris le 12 juillet 1790 durant la Révolution française, un décret fut adopté par l'Assemblée nationale constituante : la constitution civile du clergé.

Promulgation de la constitution civile du clergé(gravure allégorique, BN)


 Pour rappel, la France avait hérité du moyen âge d'un Etat influencé par l'église. Cette dernière bénéficie d'un immense privilège et accumulait une grande fortune.  Ce décret va causer la ruine de la Révolution démocratique inaugurée un an plus tôt.

Une réforme unilatérale

Le 2 novembre 1789, les députés français ont voté la nationalisation des biens de l'Église. Ils ont par ailleurs dissous les ordres religieux contemplatifs le 13 février 1790, tout en ménageant les religieux qui s'occupent d'enseignement ou d'oeuvres caritatives. Évidemment, ils ont mis en oeuvre ces réformes sans en référer au pape.

Dans la foulée, les députés veulent mettre l'Église de France en harmonie avec les nouvelles institutions nationales. Un « comité ecclésiastique » rédige la Constitution civile du Clergé et la soumet à l'Assemblée. Le document abroge le concordat conclu en 1516 entre le roi François 1er et les représentants du pape sans se référer à ce dernier.

– La carte religieuse est calquée sur la carte administrative avec un diocèse par département (83 au total) au lieu de 135 précédemment, aux contours parfois extravagants.

– L'État s'engage à appointer les évêques et les curés. Il fixe des niveaux de traitements d'ailleurs tout à fait convenables. 50 000 livres pour l'évêque métropolitain de Paris, 20 000 livres pour les autres évêques, 1 200 à 6 000 livres pour les curés.

– Les curés et les évêques sont invités à prêter « en présence des officiers municipaux, du peuple et du clergé, le serment d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi, et de maintenir de tout son pouvoir la constitution ».

Serment du Curé de Sablière



– Les évêques et les curés doivent être désignés par les électeurs de leur paroisse ou de leur diocèse, que ces électeurs soient catholiques, athées, protestants ou encore voltairiens... Le pape n'a plus d'avis à donner sur ces nominations (il est vrai que les souverains de l'Ancien Régime avaient déjà pris l'habitude de s'arroger le choix des évêques au détriment du souverain pontife).

À propos de la Constitution civile du clergé, Monseigneur Boisgelin, archevêque d'Aix, note judicieusement : « Jésus-Christ a donné mission aux apôtres et à leurs successeurs pour le salut des fidèles ; il ne l'a confiée ni aux magistrats ni au roi » (Jean Tulard, Les révolutions de 1789 à 1851, Fayard, 1985).

Deux jours plus tard, le 14 juillet 1790, les Français et la famille royale célèbrent ensemble la Fête de la Fédération. La Révolution semble close et la monarchie constitutionnelle bien installée.

Le 10 mars 1791, le roi reçoit l'avis négatif du pape Pie VI. Ce dernier, opposé à l'élection des curés et des évêques par les fidèles, condamne en bloc la Constitution civile du clergé. Par la suite, lorsque des évêques élus conformément à la Constitution civile solliciteront son investiture, il la leur refusera, les plaçant devant l'obligation de choisir entre Rome et la Révolution.

Voyant cela, l'Assemblée exige du clergé, le 27 novembre 1790, un serment de fidélité à la Constitution civile du clergé... La moitié des curés et tous les évêques sauf 4 (dont Talleyrand et Loménie de Brienne) s'y refusent ! C'est la rupture entre les catholiques et la Révolution. Les ecclésiastiques qui prêtent serment sont appelés jureurs, assermentés ou constitutionnels ; les autres insermentés, non-jureurs ou réfractaires. 

Le 29 novembre 1791, un décret donne aux administrateurs locaux de déporter les prêtres de leur domicile en cas de trouble.

La rupture est consommée le 13 avril 1791 avec un bref du pape (un décret) qui déclare la Constitution civile du clergé « hérétique et schismatique » ! Le roi Louis XVI, très pieux, est dès lors confronté à un dilemme qui va le conduire à la fuite à Varennes.

Enfin, la paix religieuse est totalement revenue avec Bonaparte , alors 1er Consul, qui signe le Concordat avec le Pape en 1801.  

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